L'OGRELET. – « Tu es grand comme mon
père » ont dit les enfants et ils sont partis
jouer dans la cour. Je suis resté seul à mon
pupitre pendant toute la récréation.
MERE DE L'OGRELET. – Petit ou grand,
la maîtresse sera contente si tu aimes les
mots et les chiffres.
L'OGRELET. – C'est ce qu'elle a dit pour
me consoler. Je peux faire mon devoir tout
de suite ?
Pendant que la mère enlève les assiettes,
l'Ogrelet sort de son sac d'école cahiers,
crayons et gomme à effacer.
Je dois écrire mon nom dix fois sur la première page et sur les lignes.
Elle nettoie la table, regardant son petit
de temps à autre. Le crayon en l'air, l'Ogrelet a le regard rêveur.
MERE DE L'OGRELET. – Tu n'écris pas mon
Ogrelet ?
L'OGRELET. – Je n'avais pas mon nom
dans le cahier de la maîtresse, comme les
autres, et je dois choisir quel nom écrire.
Lequel de mes noms me va le mieux,
maman ?
Nogrelet,
Togrelet,
Logrelet...
MERE DE L'OGRELET. – Mon Ogrelet, mon
petit Ogrelet et l'Ogrelet sont des mots
doux entre toi et moi.
Jamais tu ne dois les prononcer à l'école et
encore moins les écrire.
L'OGRELET. – Je peux écrire « Simon » ?
MERE DE L'OGRELET. – Simon ?
L'OGRELET. – C'est un nom que tu dis
parfois dans ton sommeil.
MERE DE L'OGRELET. – Simon est un joli
prénom.
L'OGRELET. – J'écrirai Simon, c'est court
et ça sonne bien. La maîtresse a dit que tu
dois le faire une fois.
La mère de l'Ogrelet écrit.
MERE DE L'OGRELET. – S-I-M-O-N. Simon
te va comme un gant. C'est doux comme
de la soie... (pour elle-même)... chargé de
souvenirs. Je ne sais pas si j'aurai du plaisir
à le dire tous les jours...