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Groupement thématique • Portraits de séducteurs, peintures de séductrices
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Groupement thématique
Texte 1
Marivaux, Le Paysan parvenu (1734)
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Texte
Un jeune paysan prénommé Jacob est envoyé à Paris apporter au seigneur
de son village le vin récolté. Il est bientôt présenté à l'épouse de celui-ci qui
le trouve séduisant et décide de le garder près d'elle.
2. Me frisa : coiffa en boucles mes cheveux.
3. Livrée : marque distinctive d'un habit de domestique.
4. Piquant : plaisant, séduisant.
5. Lorgnaient : regardaient avec désir.
Pour surcroît de bonne humeur, le soir du même jour on m'appela
pour faire prendre ma mesure par le tailleur de la maison, et je ne saurais
dire combien ce petit événement enhardit mon imagination, et la rendit
sémillante1.
C'était madame qui avait eu cette attention pour moi. Deux jours après on m'apporta mon habit avec du linge et un chapeau, et tout le reste de mon équipage. Un laquais de la maison, qui avait pris de l'amitié pour moi, me frisa2 ; j'avais d'assez beaux cheveux. Mon séjour à Paris m'avait un peu éclairci le teint ; et, ma foi ! quand je fus équipé, Jacob avait fort bonne façon.
La joie de me voir en si bonne posture me rendit la physionomie plus vive et y jeta comme un rayon de bonheur à venir. Du moins tout le monde m'en prédisait, et je ne doutais point du succès de la prédiction. [...] On vint m'avertir, de la part de madame, de l'aller trouver.
Cet ordre redoubla encore ma reconnaissance pour elle ; je n'allai pas, je volai. Me voilà, madame, lui dis-je en entrant ; je souhaiterais bien avoir assez d'esprit pour vous remercier à ma fantaisie ; mais je mourrai à votre service, si vous me le permettez. C'est une affaire finie ; je vous appartiens pour le reste de mes jours.
Voilà qui est bien, me dit-elle alors ; tu es sensible et reconnaissant, cela me fait plaisir. Ton habit te sied bien ; tu n'as plus l'air villageois.
Madame, m'écriai-je, j'ai l'air de votre serviteur éternel, il n'y a que cela que j'estime.
Cette dame alors me fit approcher, examina ma parure ; j'avais un habit uni et sans livrée3. Elle me demanda qui m'avait frisé, et me dit d'avoir toujours soin de mes cheveux, que je les avais beaux, et qu'elle voulait que je lui fisse honneur. Tant que vous voudrez, quoique vous en ayez de tout fait, lui dis-je ; mais n'importe, abondance ne nuit point. Notez que madame venait de se mettre à sa toilette, et que sa figure était dans un certain désordre assez piquant4 pour ma curiosité.
Je n'étais pas né indifférent, il s'en fallait beaucoup ; cette dame avait de la fraîcheur et de l'embonpoint, et mes yeux lorgnaient5 volontiers.
Elle s'en aperçut, et sourit de la distraction qu'elle me donnait ; moi, je vis qu'elle s'en apercevait, et je me mis à rire aussi d'un air que la honte d'être pris sur le fait et le plaisir de voir rendaient moitié niais et moitié tendre ; et la regardant avec des yeux mêlés de tout ce que je dis là, je ne lui disais rien.
De sorte qu'il se passa alors entre nous deux une petite scène muette qui fut la plus plaisante chose du monde ; et puis, se raccommodant ensuite assez négligemment : À quoi penses-tu, Jacob ? me dit-elle. Hé ! madame, repris-je, je pense qu'il fait bon vous voir, et que monsieur a une belle femme.
Je ne saurais dire dans quelle disposition d'esprit cela la mit, mais il me parut que la naïveté de mes façons ne lui déplaisait pas.
1. Sémillante : vive, enjouée, ardente.C'était madame qui avait eu cette attention pour moi. Deux jours après on m'apporta mon habit avec du linge et un chapeau, et tout le reste de mon équipage. Un laquais de la maison, qui avait pris de l'amitié pour moi, me frisa2 ; j'avais d'assez beaux cheveux. Mon séjour à Paris m'avait un peu éclairci le teint ; et, ma foi ! quand je fus équipé, Jacob avait fort bonne façon.
La joie de me voir en si bonne posture me rendit la physionomie plus vive et y jeta comme un rayon de bonheur à venir. Du moins tout le monde m'en prédisait, et je ne doutais point du succès de la prédiction. [...] On vint m'avertir, de la part de madame, de l'aller trouver.
Cet ordre redoubla encore ma reconnaissance pour elle ; je n'allai pas, je volai. Me voilà, madame, lui dis-je en entrant ; je souhaiterais bien avoir assez d'esprit pour vous remercier à ma fantaisie ; mais je mourrai à votre service, si vous me le permettez. C'est une affaire finie ; je vous appartiens pour le reste de mes jours.
Voilà qui est bien, me dit-elle alors ; tu es sensible et reconnaissant, cela me fait plaisir. Ton habit te sied bien ; tu n'as plus l'air villageois.
Madame, m'écriai-je, j'ai l'air de votre serviteur éternel, il n'y a que cela que j'estime.
Cette dame alors me fit approcher, examina ma parure ; j'avais un habit uni et sans livrée3. Elle me demanda qui m'avait frisé, et me dit d'avoir toujours soin de mes cheveux, que je les avais beaux, et qu'elle voulait que je lui fisse honneur. Tant que vous voudrez, quoique vous en ayez de tout fait, lui dis-je ; mais n'importe, abondance ne nuit point. Notez que madame venait de se mettre à sa toilette, et que sa figure était dans un certain désordre assez piquant4 pour ma curiosité.
Je n'étais pas né indifférent, il s'en fallait beaucoup ; cette dame avait de la fraîcheur et de l'embonpoint, et mes yeux lorgnaient5 volontiers.
Elle s'en aperçut, et sourit de la distraction qu'elle me donnait ; moi, je vis qu'elle s'en apercevait, et je me mis à rire aussi d'un air que la honte d'être pris sur le fait et le plaisir de voir rendaient moitié niais et moitié tendre ; et la regardant avec des yeux mêlés de tout ce que je dis là, je ne lui disais rien.
De sorte qu'il se passa alors entre nous deux une petite scène muette qui fut la plus plaisante chose du monde ; et puis, se raccommodant ensuite assez négligemment : À quoi penses-tu, Jacob ? me dit-elle. Hé ! madame, repris-je, je pense qu'il fait bon vous voir, et que monsieur a une belle femme.
Je ne saurais dire dans quelle disposition d'esprit cela la mit, mais il me parut que la naïveté de mes façons ne lui déplaisait pas.
2. Me frisa : coiffa en boucles mes cheveux.
3. Livrée : marque distinctive d'un habit de domestique.
4. Piquant : plaisant, séduisant.
5. Lorgnaient : regardaient avec désir.
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Josse-François-Joseph Leriche, La Toilette, 1775, biscuit de porcelaine, château de Versailles.
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Préparer le commentaire composé
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- Retrouvez le texte à imprimer en
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Étape 1 Première lecture et repérages
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Question 1
Comprendre le texte
a) Cherchez la définition du mot « parvenu »
pour comprendre l'histoire du roman de Marivaux.
b) Résumez l'extrait.
Pourquoi s'agit-il d'un moment déterminant dans la vie de Jacob ?
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Étape 2 Analyser le texte
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Question 2
L'importance de l'élégancea) De quels changements d'apparence Jacob bénéficie-t-il ?
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Question 3
La toilettea) Qu'appelle-t-on la toilette de Madame ? En quoi est-ce important dans les jeux de séduction ?
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Question 4
Une séduction réciproquea) Comment Madame provoque-t-elle le rapprochement avec Jacob ? Comment lui, à son tour, y répond-il ?
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Étape 3 Préparer l'introduction et la conclusion
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Question 5
IntroductionChoisissez la problématique qui vous semble la plus pertinente parmi les suivantes. Justifiez votre choix.
- Quelle image des rapports entre maîtres et valets est ici donnée ?
- Comment les jeux de séduction présentés dans le texte reposent-ils sur l'expression implicite du désir ?
- En quoi la mise en avant des apparences au détriment du mérite des personnages préfigure-t-elle les contestations sociales de 1789 ?
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Question 6
ConclusionRappelez comment la séduction annonce ici la clef de l'ascension de Jacob, puis reliez ce texte à Bel-Ami.
Une erreur sur la page ? Une idée à proposer ?
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j'ai une idée !
Oups, une coquille
