« Nous sommes aujourd'hui un peuple libre et souverain débarrassé des fardeaux passés. Nous regardons le monde avec des yeux limpides et amicaux et l'avenir avec espoir et confiance.

Certes, le fardeau de l'occupation étrangère est maintenant loin, mais la liberté nous met face à d'autres responsabilités et d'autres fardeaux que seul l'esprit d'un peuple libre, auto-discipliné et déterminé peut relever afin de préserver et de promouvoir cette liberté. [...]

Notre objectif premier et immédiat sera de mettre fin à toutes les querelles internes et les violences qui défigurent, détériorent et minent la cause de la liberté. Cela sans oublier de prendre en considération les grandes difficultés économiques qu'endure une population en grande détresse. [...]

Je souhaiterais adresser quelques mots à nos forces, civiles et militaires. Les vieilles distinctions et différences sont maintenant révolues  ; aujourd'hui, nous sommes tous les fils et les filles libres de l'Inde, fiers de la liberté de notre pays et ensemble à son service. Notre allégeance commune est pour l'Inde. Dans les jours à venir, nos forces et nos experts seront appelés à jouer un rôle vital pour l'Inde, remplissons-le en bons camarades. »

Sa liberté, l'Inde la doit à deux hommes, aussi proches que dissemblables, Gandhi (1869-1948) et Nehru (1889-1964). Deux hindous, brahmanes de haute caste, ayant reçu une excellente éducation à l'anglaise, deux avocats se lançant dans la politique, dans les rangs du Parti du Congrès, dont ils prirent la tête. Chacun à sa façon, avec son style, le charismatique Mahatma [...] et le Pandit¹, l'aristocrate dandy avec son petit calot blanc, consacrèrent leur vie à l'indépendance de leur pays, au prix de brimades et d'années de prison (3 262 jours, soit près de dix ans pour Nehru, entre 1921 et 1942). [...] Ils réussirent cette prouesse : faire passer leur pays directement du statut de colonie au sein du raj² britannique à celui d'État souverain, le 15 août 1947. Et, de surcroît, sans avoir recours à la force.

Même imparfaite, l'Inde est objectivement la plus grande démocratie du monde. Seule ombre au tableau, et de taille : la partition douloureuse d'avec le Pakistan, à l'été 1947, sur des bases confessionnelles (musulmans d'un côté de la frontière, hindous de l'autre) qui fit des centaines de milliers de morts et fut toujours un remords pour Gandhi et Nehru.