Dans le Coran,
ribât désigne le lieu où l’on rassemble les montures en vue d’une expédition armée ; cela est lié aux guerres tribales et à la lutte de Mahomet, depuis Médine, contre l’aristocratie de La Mecque, qui le poussa à mener un djihad. Par extension, le ribât est devenu un établissement militaire et religieux – une sorte de couvent-forteresse donc – installé aux frontières de l’Islam pour protéger ses frontières et lancer des raids en territoire infidèle en vertu du devoir de djihad. Les hommes du ribât, les
murabitun, sont des volontaires qui viennent faire temporairement retraite et servir militairement ; ce service est méritoire. Le ribât est doté par des aumônes et par le butin.
Dès le VIII
e siècle […] on connaît des ribâts aux frontières orientales du monde musulman, en Khorasan, mais aussi sur les côtes tunisiennes (Monastir, Sousse). La fréquence de termes comme
rabida,
arrabida en Espagne et au Portugal laisse à penser qu’il y avait de nombreux ribâts en al-Andalus. Le nom des conquérants almoravides
1, à la fin du XI
e siècle, vient du mot ribât. Les Almoravides,
al murabitun, étaient des hommes du ribât. Rien d’impossible dès lors à ce que les combattants chrétiens de la Reconquista en Espagne (mais aussi en Sicile), ou même les croisés en Orient, aient été influencés par cette institution musulmane [pour fonder les ordres de moines-chevaliers tel que l’ordre du Temple]. […]
Le cas de Guardamar en Espagne, mais aussi ceux, mieux connus, de Sousse et de Monastir en Tunisie
montrent que, aux IX
e-X
e siècles, des édifices spécifiques – des ribâts au sens de couvents-forteresses – avaient été construits. […] À défaut de devenir le modèle de l’ordre militaire (ce que je ne crois pas), cela a pu influer sur certaines formes de la réaction chrétienne à l’offensive musulmane : je pense naturellement au développement très important de ces groupes de confrères associés aux ordres religieux-militaires présents en Espagne (le Temple ou l’Hôpital).