Chasser les idées noires et la baleine blanche
Sans aucun doute, mon départ pour la pêche à la baleine faisait partie du Grand Spectacle du monde, écrit par la Providence il y a fort longtemps. […]
L’une des raisons principales [qui me poussa à accepter ce rôle dans la grande comédie humaine], c’est l’image impressionnante de la grande baleine. Un monstre aussi menaçant et mystérieux, cela attisait ma curiosité. Et puis les mers sauvages et lointaines où il roule sa masse, grosse comme une ile, et les dangers sans nom qu’il représente et auxquels on ne peut échapper : tout cela, ainsi que les mille trésors qui émerveilleraient mes yeux et mes oreilles en Patagonie, m’incita à réaliser mon vœu. Pour d’autres, ces choses n’auraient peut-être pas eu le même attrait. Mais moi, je suis irrémédiablement attiré par le lointain. J’adore naviguer sur des mers interdites et poser le pied sur des côtes barbares. [...]
Pour toutes ces raisons donc, la chasse à la baleine était la bienvenue. Les grandes écluses du monde des merveilles s’ouvraient en grand et, dans les mirages qui m’incitaient à suivre mon désir, il y avait des cortèges interminables de baleines qui flottaient deux par deux jusqu’au plus profond de mon âme, escortant un grand fantôme blanc, pareil à une colline enneigée dans le ciel.
- 1851. Chasser les idées noires et la baleine blanche
- 1821. Lever de lune sur la mer