Des conflits d'usage en hausse. La diversification des fonctions des espaces ruraux met en présence des acteurs qui ont des usages différents voire contradictoires de l'espace. Les fonctions productives (agricoles et industrielles) peuvent entrer en contradiction avec les fonctions résidentielles, récréatives et environnementales : des conflits se déclenchent à partir de projets d'aménagement considérés comme une source de nuisance (route, centrale électrique, usine) ou de pollution (syndrome NIMBY).

Les conflits autour de la terre marquent les Suds. Des États ou des entreprises des pays développés et émergents cherchent à sécuriser leurs approvisionnements. L'accaparement des terres conduit à une multiplication des conflits dans les espaces ruraux des pays pauvres.

Des conflits parfois asymétriques. Il arrive que le rapport de force soit très déséquilibré entre les acteurs en conflit ; c'est souvent le cas lorsque de petites communautés de villageois ou de paysans s'opposent à un projet minier, industriel ou énergétique polluant.

En 1313, le pape Clément V achète une source située sur le territoire du petit village de Caromb, à environ 20 km d'Avignon, où la papauté réside à l'époque. Il lance la construction d'un canal pour amener l'eau à la ville voisine de Carpentras. Mais les habitants du village de Caromb se révoltent contre cette décision, prise sans leur accord et qui les prive d'une ressource naturelle essentielle. Pendant plusieurs mois, ils sabotent les chantiers, détournent l'eau, bouchent la source. Punis par de lourdes amendes, ils finissent par se résigner, même si le litige rebondit plusieurs fois au cours du XIV^e siècle. Au Moyen Âge, ce genre de conflits d'usage autour d'une ressource naturelle ou d'un espace rural stratégique est extrêmement fréquent : les différents usagers se disputent un champ fertile, un alpage exposé au soleil, une source ou encore des ruches. Le plus souvent, ces conflits sont réglés par des arbitrages : on partage le bien disputé. Ces querelles forcent peu à peu les juristes à inventer de nouvelles lois réglant les appropriations et les usages des espaces agricoles, longtemps possédés et gérés en commun par les collectivités villageoises locales.