Avec la théorie freudienne de l’inconscient, ce sont toutes
les certitudes sur nous-mêmes qui vacillent.
Nos rêves nous apparaissent souvent incompréhensibles. Ils
semblent dépourvus de toute logique et parfois très confus, à
tel point que nous nous demandons pourquoi nous les avons
faits. Avec sa théorie de l’inconscient, Freud leur donne une
nouvelle signification. Il émet l’hypothèse de l’inconscient
pour pouvoir donner du sens aux phénomènes psychiques
qui échappent à la conscience. Ainsi, le rêve
représente un exutoire de l’inconscient,
c’est-à-dire la manifestation détournée de
désirs que nous avons refoulés pour pouvoir
accéder au monde commun des hommes. En
effet, la société humaine exige que nous ne
fassions pas tout ce que nous désirons faire, n’importe où et n’importe comment. Vivre avec les autres suppose
des règles, et donc une limite à nos désirs. C’est ainsi
que nous refoulons les désirs que nous jugeons inacceptables.
Toutefois, ces désirs refoulés ne disparaissent pas ; ils
vont constituer notre inconscient et vont chercher à trouver
des voies d’expression. Le rêve est un des moyens qu’a trouvé
notre psychisme pour permettre à ces désirs de réaliser une
satisfaction symbolique et purement imaginaire.
« Nous sommes de l’étoffe dont sont
faits les rêves, et notre petite vie
est entourée de sommeil. »
William Shakespeare
Doc. 1
Le rêve de Pénélope
Toutefois, expliquez‑moi ce songe ; écoutez. Dans
ma maison vingt oies mangent le froment détrempé
de la montagne, un grand aigle au bec recourbé
brise le cou de tous ces oiseaux, et les tue ; elles gisaient
en foule dans le palais ; l’aigle remonte triomphant
dans les airs. Je pleurais, je gémissais, quoique ce fût un
songe ; les femmes des Grecs étaient rassemblées autour
de moi, qui me lamentais de ce que l’aigle avait tué les
oiseaux. Mais bientôt après cet aigle se place sur le toit
élevé ; prenant alors une voix humaine, il me dit :
« Rassurez‑vous, fille de l’illustre Icarios ; ce n’est
point un songe, mais un présage certain, l’événement
s’accomplira. Ces oiseaux sont les prétendants ; moi,
j’étais l’aigle tout à l’heure, mais maintenant je suis
votre époux, qui viens en ces lieux, et qui donnerai la
mort à tous les prétendants. »
« À ces mots, le doux sommeil m’abandonne. Alors,
regardant avec attention, je vis les oies qui becquetaient
le froment dans un large bassin, comme auparavant. »
« O reine, lui dit alors le sage héros, il ne faut point
interpréter autrement votre songe […]. »
La prudente Pénélope lui répondit en ces mots :
« Étranger, les songes sont vains, et leurs paroles incertaines ; ils n’accordent pas aux hommes tout ce qu’ils
promettent. Il existe deux portes pour les songes légers ;
l’une est de corne, et l’autre est d’ivoire ; ceux qui traversent
la porte d’ivoire sont trompeurs, et n’apportent
que des paroles qui ne s’accomplissent pas ; ceux, au
contraire, qui traversent la porte de corne prédisent la
vérité, quand ils nous apparaissent. »
Homère, Odyssée, VIIIe s. av. J.-C.,
chapitre XIX, trad J.-B. Dugas-Montbel.
Doc. 2
Le mécanisme du rêve
Même dans le rêve, à cause de la censure, les désirs qui
sont inacceptables pour la conscience ne peuvent pas s’exprimer
et se dissimulent derrière un langage symbolique.
C’est pour cette raison que le sens du rêve nous échappe et
qu’il nous paraît absurde. Le rêve trouve son origine dans
notre vécu, en particulier dans des souvenirs oubliés mais
qui se dissimulent à nous. Il fonctionne par condensation,
c’est-à-dire qu’il superpose plusieurs images en une seule.
Il fonctionne également par déplacement : je rêve d’une
chose banale pour dissimuler un désir plus profond. Ainsi,
le rêve raconte une histoire, parfois abracadabrante, qui
transforme les idées en images visuelles : c’est la figuration.
Il faut donc distinguer le contenu manifeste du rêve, autrement dit le récit du rêve tel que la mémoire s’en souvient,
et le contenu latent, c’est‑à‑dire le sens profond qui se
dissimule derrière ce dont on se souvient. C’est là que la
psychanalyse peut intervenir pour aider à interpréter le
sens caché de nos rêves.
Doc. 3
Le rêve réalise un désir
Malgré nos demandes, les ayants droit de ce texte refusent que nous affichions celui-ci sur notre site en libre accès. Nous le regrettons profondément et nous excusons pour la gêne occasionnée.
⬥ Le rêve est un terrain privilégié pour se demander s’il
existe des parts de notre psychisme qui échappent à
la vigilance de la conscience et prennent une autonomie
« malgré » nous. Ma pensée est‑elle toujours
consciente ?
⬥ Freud est le premier psychanalyste à se poser la question
de l’existence d’une instance psychique indépendante,
car cachée à la conscience, et qui serait en mesure
d’expliquer des comportements aussi ordinaires que
le rêve ou aussi problématiques que la névrose et la
psychose. Son hypothèse d’un inconscient psychique
est‑elle nécessaire ? Autrement dit, peut‑on se passer
de l’hypothèse de l’inconscient ?
⬥ Si le psychisme humain ne se limite pas à la conscience,
le moi n’est-il pas constamment assujetti à des instances
rivales (Ça et Surmoi) ou à des principes
contraires (plaisir et réalité) ? Quelles rivalités le Moi arbitre‑t‑il ?
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