⬥ La pensée politique de Rawls le conduit à réviser la fiction du contrat social, qui ne correspond pas à un événement historique, puisque nous vivons dans des associations involontaires la plupart du temps. La question de la justice nous apparaît alors comme une réaction à une situation qui nous oppresse, qui exige que nous renoncions à notre liberté sans que nous en comprenions la nécessité. Cette réflexion remet en cause les fausses évidences dans le cadre desquelles le pouvoir s’installe et s’exerce dans les démocraties occidentales.
⬥ Le fait que la justice favorise, ou légitime, les hiérarchies sociales fondées sur l’héritage, l’habileté à parler, ou l’intelligence abstraite peut être questionné. Se faire indifférent à tout intérêt est une condition nécessaire à la réflexion sur la justice.
⬥ Quels sont les principes de justice ? Il les établit à partir de la « position originelle ». Il imagine que le choix de ces principes soit confié à des citoyens, à la fois rationnels et raisonnables, placés dans une situation d’égalité. Chacun a autant de poids que les autres et tous ont accepté de se placer sous « un voile d’ignorance », c’est‑à‑dire une situation dans laquelle chacun ignore quels sont ses talents personnels, sa situation sociale et les avantages dont il pourrait bénéficier dans la société. Ainsi ils ne se décideront pas selon leurs intérêts personnels.
⬥ Selon Rawls, cette position originelle aboutit à un consensus unanime sur deux principes :
- Il serait possible d’énoncer des principes de justice sociale, unanimes, si nous confions la fondation de la société civile par contrat à des individus capables d’oublier ce qui les détermine aujourd’hui : sexe, fortune, qualités naturelles, idéologie.
- Ils se mettraient d’accord sur les principes d’égalité et de respect des droits individuels : droit égal au plus grand nombre de libertés de base (droit de vote et d’éligibilité, liberté d’expression, protection de la personne, droit à la propriété privée, etc.), respect de la juste égalité des chances.
⬥ L’enjeu de ces deux principes est de concilier justice sociale et liberté, mais il s’agit aussi de parvenir à penser une justice sociale compatible avec certaines inégalités. En effet, les inégalités socio-économiques sont acceptables, mais seulement si elles bénéficient aux membres les plus défavorisés de la société.