À la nuit
Toi qui regardes l’homme avec tes yeux d’étoiles,
Vois mon cœur bondissant, ivre comme un bateau1,
Dont le vent rompt le mât et fait claquer la toile !
Regarde, nuit dont l’œil argente2 les cailloux,
Ce cœur phosphorescent dont la vive brûlure
Éclairerait, ainsi que les yeux des hiboux,
L’heure sans clair de lune où l’ombre n’est pas sûre.
Vois mon cœur plus rompu, plus lourd et plus amer
Que le rude filet que les pêcheurs nocturnes
Lèvent, plein de poissons, d’algues et d’eau de mer
Dans la brume mouillée, agile et taciturne3.
À ce cœur si rompu, si amer et si lourd,
Accorde le dormir sans songes et sans peines,
Sauve-le du regret, de l’orgueil, de l’amour,
Ô pitoyable nuit, mort brève, nuit humaine !...
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Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.
[...]
It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate :
I am the captain of my soul.