Pouvez‑vous nous donner une idée du nombre de joueurs ?
En 2014, on dénombrait 1,5 milliard de joueurs actifs dans le monde, ce qui représentait près de la moitié de la population connectée à Internet. Ce nombre a continué d'augmenter au fur et à mesure selon la même proportion. Il s'agit d'un chiffre considérable, même si, selon les continents, la part de la population jouant aux jeux vidéo n'est pas identique. Cela dit, il demeure difficile d'estimer le nombre exact de joueurs dans le monde en raison de la mauvaise image qui colle au joueur, celle du gamer adolescent attardé. Cela conduit à une sous‑déclaration dans les enquêtes. [...]
Le jeu vidéo semble être étroitement lié aux évolutions technologiques…
C'est une industrie numérique par nature. Il existe deux différences majeures entre les jeux vidéos et les autres secteurs de l'industrie culturelle. D'une part, les moyens de production et de consommation : ceux‑ci étaient auparavant déconnectés l'un de l'autre – au cinéma, le spectateur n'a pas besoin d'un équipement particulier ; c'est encore plus évident dans le cas d'un lecteur. Dans le cas du jeu vidéo, la technologie est non seulement nécessaire à la production, mais aussi à la pratique.
Le second élément de différenciation entre l'industrie du jeu vidéo et les autres secteurs tient au contenu lui‑même : dans le cas du jeu, il n'est pas autonome. Un livre demeure identique pour tous les lecteurs, ils le perçoivent et l'interprètent ensuite selon leurs sensibilités. Ce n'est pas le cas du jeu vidéo, où chaque expérience est spécifique : on ne joue jamais deux fois la même partie.
Diriez‑vous qu'une culture nouvelle émerge depuis 40 ans avec le jeu vidéo ?
Il s'agit d'une véritable pop culture. Prenez l'exemple de la Paris Games Week, ce festival qui a lieu chaque année au début de l'automne. Une culture invisible apparaît alors en plein jour, extrêmement diversifiée, avec une grande variété de joueurs et d'univers (manga, guerre, course automobile, football, science‑fiction, etc.). Ces pratiques culturelles donnent lieu à de grands rassemblements, comme l'e‑sport ou divers salons où des visiteurs de tous âges viennent, parfois déguisés. Ce sont des phénomènes de consommation de masse qui passent complètement sous le radar des institutions et échappent complètement à la culture savante.