Dans un pays démocratique, comme les États‑Unis, le député n'a presque jamais de prise durable sur l'esprit de ses électeurs. […] L'instabilité démocratique fait qu'il change sans cesse de face. Il faut donc le captiver tous les jours. Il n'est jamais sûr d'eux ; et, s'ils l'abandonnent, il est aussitôt sans ressource […]. Ainsi […], dans les pays démocratiques, les membres des assemblées politiques songent à leurs électeurs plus qu'à leur parti, tandis que, dans les aristocraties, ils s'occupent plus de leur parti que de leurs électeurs. Or, ce qu'il faut dire pour plaire aux électeurs n'est pas toujours ce qu'il conviendrait de faire pour bien servir l'opinion politique qu'ils professent. […] Nous avons montré le petit côté des discussions politiques dans les démocraties ; faisons voir le grand. […] Dès les premiers débats qui ont eu lieu dans les petites assemblées coloniales d'Amérique à l'époque de la Révolution, l'Europe fut émue. […] Je ne vois rien de plus admirable ni de plus puissant qu'un grand orateur discutant de grandes affaires dans le sein d'une assemblée démocratique. Comme il n'y a jamais de classe qui y ait ses représentants chargés de soutenir ses intérêts, c'est toujours à la nation tout entière, et au nom de la nation tout entière qu'on parle. […] Tous les hommes s'y intéressent parce qu'il s'agit de l'homme, qui est partout le même.