Mes parents étaient au chômage. Mon mari aussi. [...] Un homme est entré dans l'atelier, c'était un socialiste, non, plutôt un communiste. Il a dit « allez, on arrête les bécanes ! »
On a arrêté les machines et défilé vers le centre de Wintzenheim. Je suis montée sur l'escalier de la mairie pour rassembler mes collègues. Un beau jeune homme, bien habillé, le chef des « Rouges », m'a dit :
-Viens, il ne faut pas rester ici. Tu seras mieux là-bas.
Il m'a prise dans ses bras et m'a soulevée sur la fontaine du village. De là, je dominais la foule des ouvriers, hommes et femmes, et je leur ai parlé. Je leur ai dit :
-On va organiser une réunion !
Ils m'ont applaudie.
[...] Puis la grève s'est terminée. [...] Tout le village a défilé avec des drapeaux. Il y avait des explosions de joie. Les commerçants étaient dans la rue. On se sentait plus léger. On pouvait manger correctement.
Rosalie Schuller
« Quelques tranches de vie de notre centenaire », Société dʼhistoire de Wintzenheim, 2005.