L'ouvrage de Tocqueville cherche à concilier l'amour pour l'égalité et l'amour pour la liberté qui anime les individus modernes. Pour ce faire, deux écueils sont à éviter.
- Le premier écueil résulte du fait que certains ont peur de l'égalité, redoutant la révolution et l'anarchie si les pauvres se rebellent pour obtenir les mêmes droits individuels que les autres. Ils abandonnent donc la liberté parce qu'elle serait dangereuse. Ils ont peur de leur propre liberté. Paradoxalement, c'est comme s'ils avaient peur d'eux-mêmes.
- Le second écueil est la conséquence du fait que d'autres suivent une autre route : la liberté leur semble impossible. Admettant que la servitude est nécessaire, ils commencent à aimer l'idée d'un maître qui leur commanderait.
Tocqueville veut éviter ces deux écueils. Il lui faut donc montrer que l'égalité des conditions est un fait et que la liberté est possible, mais à certaines conditions bien précises. Le goût de l'indépendance anime les individus modernes et ne pourra être étouffé. Il évitera les despotismes à venir. Tocqueville veut surtout nous inviter à la vigilance et nous rendre prêts à nous battre pour cette indépendance individuelle précieuse.
Certes l'égalité des conditions conduit à l'uniformisation, au conformisme social et à un nivellement par le bas des talents et des génies, mais elle est plus juste que ce que l'aristocratie avait à offrir, en ne privilégiant qu'un petit nombre au détriment des autres. Il faut donc poursuivre la belle tâche de l'égalisation des conditions en étant attentifs à ce que l'indépendance individuelle n'en pâtisse pas.
Pour répondre à la problématique générale qui était la nôtre au début de cette lecture suivie, à savoir celle de mesurer les conséquences de la liberté et de l'égalité dans nos démocraties modernes, nous pouvons conclure de cette lecture que, selon Tocqueville, l'égalité des conditions a conduit à plus de justice et à un adoucissement des mœurs grâce au dogme de la souveraineté du peuple. Le respect pour la loi et les institutions en est sorti grandi. Toutefois, cela ne doit pas se faire au prix du sacrifice des libertés individuelles. Le citoyen doit veiller à lutter contre la centralisation du pouvoir grâce aux associations, à la lecture de la presse et à la défense de sa sphère privée.