Chapitre 4
Repères - Glossaire
Ce sont deux modalités distinctes du jugement. Croire, c'est
accepter un jugement sans avoir préalablement pu obtenir
d'arguments logiquement valides (démonstration ou preuve).
Au contraire, la raison établit un savoir quand elle exige
d'éprouver la valeur logique d'un jugement avant de l'approuver : « C'est par croire que l'on devient esclave ; qui se
contente de sa pensée ne pense plus rien » (Alain, Propos).
Ce sont deux façons de se sentir tenu de faire quelque chose,
suivant que la raison se soumet à ce qui lui est donné ou, au
contraire, qu'elle est en situation de n'obéir qu'à elle-même.
Ce que la raison ressent intérieurement comme un engagement
qui la tient est une obligation. Quand la raison dépend
de principes étrangers, mettant en danger son exercice, il s'agit
d'une contrainte. Une contrainte nous rend « hétéronomes »,
pour reprendre les termes de Kant : elle nous prive de notre
liberté de raisonner, alors que l'obligation suppose une raison
« autonome », donc libre. Rousseau l'illustre en disant : « s'il
faut obéir par la force on n'a pas besoin d'obéir par devoir et
si l'on n'est plus forcé d'obéir on n'y est plus obligé. »
Ce qui est jugé possible peut être énoncé par la raison sans
contredire les principes logiques. Inversement, est impossible
ce qui ne peut être énoncé sans renoncer aux principes de
la logique. Par ailleurs, la possibilité désigne une éventualité,
mais ne dit rien de la réalisation de cette dernière. Par
exemple, j'ai la possibilité d'acquérir, mais cela ne signifie pas
que je suis en train d'acheter actuellement.
À l'inverse, l'impossibilité désigne l'incapacité du concept à
se produire dans la réalité. Par exemple, il est impossible de
dénombrer un ensemble infini. L'impossible, par définition,
n'a aucune actualité. Le possible en a deux : en puissance
et en acte. Tout ce qui est réel a été possible et le réel « ne
contient rien de plus que le simplement possible », selon
Kant ; mais tout ce qui est possible ne sera pas nécessairement
réel, ni ne doit raisonnablement le devenir.
Ces termes désignent deux types d'arguments
de la raison. Dans sa forme
démonstrative, le raisonnement progresse
par déduction (en allant du
général au particulier) et garantit sa
cohérence, en suivant les principes de
la logique (qui détermine les formes de
tout raisonnement). Le raisonnement
par induction apporte des preuves de
ce qu'il avance, par la répétition des
observations destinées à tester ses
hypothèses. La démonstration vise l'universalité
de ses conclusions ; la preuve
doit composer avec la particularité des
observations qu'elle convoque (choix
techniques, théoriques, voire culturels).
Ce terme renvoie à ce qui échappe
à la raison, de fait (savoirs provisoirement
inachevés) ou de droit (réel
inaccessible à la raison). Il se distingue
du pré-rationnel, qui renvoie à un
domaine en attente d'une rationalité
que la raison finira par découvrir. Il se
différencie également du non rationnel,
qui désigne un réel étranger à la raison,
cette dernière s'efforçant en vain
de le soumettre à ses exigences. Juger
l'irrationnel conduit soit à le rabattre à
ce que la raison connaît déjà mais qu'il
n'est pas, soit à le penser à partir de
structures niant la raison.
En latin, ratio signifie calcul. Ainsi, la raison
se définirait par la capacité de
combiner. La raison suit des règles de
combinaison qui permettent de garantir
la validité de ses jugements. Les principes
d'identité, de non-contradiction
et du tiers exclu sont les principes fondamentaux
d'une raison bien conduite
selon Aristote. Mais suffit-il de calculer
pour raisonner correctement ? Si le
latin souligne la dimension calculatoire
de la raison, le grec, lui, insiste sur sa
valeur : raisonner, c'est chercher à justifier
un raisonnement en argumentant.
Il s'agit alors de ne pas subir l'influence
du pathos (jeu sur les émotions), et de
nous élèver vers le logos, dimension
nouvelle, publique et apaisée.
En tant que faculté de comprendre, la
raison est nommée entendement. L'entendement
se rapporte à la faculté de
produire des concepts, en unissant les
données de l'expérience grâce aux catégories
intellectuelles qu'il y applique ;
de là naissent les objets que la raison
pourra ensuite saisir et manipuler (analyser,
juger, comprendre).
Le terme désigne l'action de juger, mais
également le produit de cette activité.
Un jugement consiste, pour la raison, à
mettre en relation une chose avec ses
caractéristiques, selon des liens qu'elle
est en mesure de garantir. Le jugement
« d'existence » associe à telle chose
(dont on connaît le concept) le fait d'être
dans le temps et l'espace (exister). Le
jugement « prédicatif » évalue le caractère
nécessaire (attribut appartenant
à son essence) ou contingent (attribut
accidentel que le hasard de l'histoire
lui a donné). Le jugement de « valeur »
apprécie l'objet (supposé existant et
possédant des prédicats essentiels)
selon les systèmes de valeurs reconnus
par la culture (lesquels se rapportent
généralement aux concepts de beauté,
de vérité ou de bien).
Une erreur sur la page ? Une idée à proposer ?
Nos manuels sont collaboratifs, n'hésitez pas à nous en faire part.